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Mon accouchement à domicile : récit

Dernière mise à jour : 14 oct. 2022


Un accouchement à domicile : pourquoi ?



Pour vous recontextualiser un peu les choses, j'ai vécu un premier accouchement en février 2018, à la maternité de l'hôpital de mon secteur, faute d'autre choix à l'époque. Je suis enceinte pour la première fois, je m'en remet exclusivement aux professionnels médicaux qui encadrent le suivi de ma grossesse et je n'ai donc à aucun moment l'idée de me dire que je peux ou même que j'ai envie d'accoucher ailleurs qu'entre les mains expertes d'une équipe médicale formée, dans un hôpital ! De toute façon, autour de chez nous, il n'existe aucune autre alternative puisque toutes les cliniques privées ont fermé et qu'il n'y a aucune maison de naissance à l'horizon. La décision est vite prise et l'inscription en maternité est actée.


L'accouchement se passera très bien, voie basse, péridurale, épisiotomie, bref j'ai coché toutes les cases du cas classique, banal, sans complications… enfin… c'est ainsi que je le vis et qu'on me l'explique à ce moment-là. S'en suivra ensuite mon premier post-partum, avec mon petit bébé, ma première fille, devenir maman… wouahou... mais heu...personne ne m'avait dit que ça chamboulait si fort, bref j'y reviendrais dans un article consacré à mes deux post-partum. Sachez seulement que c'est mon vécu de ce post partum qui me mènera tout droit à ce futur accouchement chez moi, mais je ne m'en rendrais compte que bien des mois après...une fois parvenue sur mon chemin de doula.


Ce parcours pour changer de métier est passionnant, je découvre tant au sujet de la maternité, de la naissance, du corps de la femme, de sa puissance, de ses capacités et puis surtout en devenant doula je pars à ma propre rencontre. Je me découvre, je revis les grands moments de mon existence depuis ma propre naissance jusqu'à celle de Margot et je comprends, mieux que ça même : je me répare. Petit à petit les fils se démêlent et tout prend sens. Je comprends pourquoi j'ai mal vécu certains événements, pourquoi à la lumière de ces livres que je lis, de ces cours que je suis, de ces conférences et autres podcasts que j'écoutent, certaines blessures s'ouvrent encore plus profondément pour finalement s'expliquer et guérir.


Je ne suis pas certaine de vouloir un autre enfant. Je suis passée par tant de phases ces trois dernières années, je me suis perdue, je me suis oubliée...Pourquoi vouloir revivre tout ça ?!

Mais le désir de donner la vie, de voir grandir un enfant, de le chérir...revient pour finir par s'imposer plus fort encore à moi.

Nous aurons un deuxième enfant, mais à une seule condition : celui-ci naîtra dans la chaleur et l'intimité de notre foyer ! C'est décidé, j'offrirais à cet enfant le cadeau d'une naissance en douceur et respectée, j'offrirai à mon mari le rôle d'acteur principal, à mes côtés lors de cette naissance et je m'offrirai à moi le cadeau de découvrir ma toute puissance, de rejoindre toutes ces femmes sauvages qui ont toujours su enfanter depuis la nuit des temps. Je me joindrai à elles le temps d'une danse intense et envoutante.


J'explique à mon mari mon souhait d'accouchement à la maison, il suit avec tant d'attention mon cheminement de doula de ces dernières années qu'il n'est pas surpris par ma proposition, néanmoins je ne veux rien lui imposer alors j'entreprends de lui expliquer pourquoi j'ai ce désir, pourquoi je ressens jusque dans ma chaire que ce bébé doit naître dans notre cocon. Je reviens également sur mon vécu de l'accouchement de Margot et il comprend rapidement, il a surtout suffisamment confiance en moi et en nous qu'il ne sera vraiment pas difficile à convaincre et il se laissera embarquer à tel point qu'il gèrera toute la préparation et la mise en place du projet d'une vraie main de maître ! J'apprendrais, au travers de nos nombreuses discussions sur le sujet, que lui aussi a vécu ce moment de la naissance de notre premier bébé avec difficultés. Il a été mis à l'écart par le corps médical, poussé dans un coin de la pièce, ignoré...bref lui aussi a une revanche à prendre. Je n'entrerais pas dans les détails scientifiques et physiologiques qui nous ont également conduit à choisir l'accouchement assisté à domicile dit "AAD", vous pouvez consulter un grand nombre de statistiques, d'études et de chiffres sur le site : www.apaad.fr Je ne développerais pas ce point car nous avons souffert de beaucoup de jugements, réprimandes et autres mises en garde de la part de personnes proches et que ce genre de choix se prend en son âme et conscience. Mon article ne vise pas à prôner telle ou telle manière de faire. Juste à vous raconter NOTRE CHOIX, à un moment donné de nos vies, pour ce bébé.



Comment s'est déroulé l'accouchement à la maison



Maintenant que vous avez le contexte, passons au récit de ce qu'il s'est passé en ce début du mois de septembre 2021.

Tous les feux sont au vert depuis la dernière échographie, les résultats des différents examens sont bons, bébé est en bonne position, la grossesse s'est déroulée (quasi) sans encombres (j'y reviendrais dans un autre article) et surtout notre sage-femme K. nous a donné sa validation finale. Ne reste plus qu'à attendre maintenant que cette petite fille pointe le bout de son nez.


Dès le lundi 30 août, je commence à sentir des contractions, mon ventre se tend et se durcit et ce de manière régulière tout au long de la journée. Pour autant, aucune sensation avec ces contractions, le travail démarre gentiment, je ne suis pas inquiète mais je sens que le moment n'est pas encore arrivé.


Mercredi 1er septembre, K. notre sage-femme vient me rendre une petite visite de contrôle pour s'assurer que bébé et moi nous portons bien. On écoute le cœur de bébé puis on passe au monitoring. Petit sourire en coin à la vue de ce dernier de la part de K. qui me tend le petit papier avec la ligne du monito. On est bien d'accord, ça ressemble fort à un monitoring de travail, mais je le sais, mon bébé n'arrivera pas aujourd'hui! Impossible car vendredi 3 septembre j'ai promis à ma fille ainée que je serais auprès d'elle pour sa toute première rentrée scolaire ! J'en parle à K. qui me sourit et me donne alors rendez-vous en fin de semaine, "une fois que mon mental aura lâché prise!".

Le jeudi ressemble aux jours précédents, les contractions sont toujours là mais elles sont indolores et identiques à la veille. Autant vous dire que mon mari trépigne d'impatience !

Le vendredi 3 septembre arrive et avant même la sonnerie du réveil, ce matin-là, je perçoit que les contractions sont différentes et que "quelque chose" s'est enclenché dans mon corps ! Nous y sommes, ce sera pour aujourd'hui.


8h30, nous arrivons à l'école pour faire la grande rentrée de Margot! Que d'émotions et en effet le cerveau humain est incroyable car durant la petite heure que nous passerons dans l'école auprès d'elle avant de la laisser, je n'aurais aucune contraction. Il suffira que je franchisse le portail de l'école pour que ces dernières reviennent tout de suite et se fassent bien plus pressantes. Mon mari me dit qu'il vaut mieux que nous rentrions à la maison pour installer notre cocon, mais lorsque la femme, qui plus est enceinte, a une idée en tête, elle ne l'a pas ailleurs! hihi Je lui demande si nous pouvons faire un détour par l'épicerie du coin pour que je récupère un colis. La femme de l'épicerie en me voyant débarquer, prête à exploser, a eu je pense un peu peur que je perde les eaux dans son magasin !!!!

Et à 10h et quelques nous voilà finalement de retour chez nous. Mon mari m'installe dans la chambre du bébé, sur mon ballon avec mon tapis, de l'eau et tout ce dont j'ai besoin, avec pour unique mission de gérer mes contractions et de changer de positions toutes les 30 minutes pour rester mobile et permettre au bébé de progresser dans sa descente dans mon bassin. Pendant ce temps, ce dernier œuvre d'arrache-pied pour faire de notre pièce à vivre une vraie salle nature ! Vers 11h, il vient me chercher pour me faire découvrir le magnifique environnement qu'il m'a créé avec la piscine en pièce maîtresse qui trône au milieu du salon ! Tout y est et je n'aurai pu espérer plus intime et plus confortable. J'ai mon canapé déplié en lit si j'ai besoin de m'allonger, un gros tapis de yoga pour les postures à 4 pattes, accroupie ou sur les genoux, le tabouret d'accouchement pour m'asseoir pendant le travail au besoin, le rebozo calé dans la porte pour me suspendre, le ballon et enfin ma piscine à 37° ! Un vrai bonheur.

J'ajoute mes touches personnelles : bougies, guirlandes LED, loupiotes, mantras écrits par mes amies lors de mon blessing way.

Puis nous décidons de prévenir la photographe. Cette dernière sera la très rapidement, pour commencer à immortaliser cette journée incroyable.

Les contractions s'intensifient progressivement, je continue à les gérer, je ressens que mon bébé se rapproche de moi et j'accueille chaque contraction, chaque nouvelle vague sans appréhension. Je suis sur un bateau et je me laisse flotter.

Mon mari utilise plusieurs points d'acupression sur moi qui sont très efficace, je fais des vocalises pour ramollir ma bouche afin de ramollir mon col. Nous formons un binôme hors pair et à chaque nouvelle vague, il est à mes côtés. Le toucher, le tenir, être près de lui me permets de garder mon ancrage, ma bulle, il est mon phare dans la nuit.

Je ne ressens pas la faim alors que l'heure du repas est déjà là mais je mange tout au long de la journée des petites quantités de fruits secs, d'amandes, je m'hydrate également en continu grâce encore une fois à mon mari qui veille à subvenir à tous mes besoins.


Autour de 13h30-14h je commence à m'interroger sur la progression de mon travail, j'ai besoin de savoir si ça avance bien ou pas afin d'économiser ou pas mes forces. Je demande donc à mon mari, qui a tenu notre sage-femme informé tout au long de la journée, de lui demander de venir. K. prendra la route tranquillement et arrivera auprès de nous autour de 15h10. Notre s-f se postera très discrètement dans un coin de la pièce et autour de 15h30 me propose un examen du col, que j'accepte volontiers.

L'examen du col dure un peu et je commence à m'interroger : "est-ce que quelque chose cloche ?!" K. m'invite à me relever et je ressens immédiatement une contraction bien plus forte que les précédentes, je suis à 10/10 ! K. m'explique alors que le bébé était coincé contre la symphyse pubienne, qu'il fallait seulement le réaligner dans le col ce qui explique la soudaine intensité des contractions, bébé est descendu d'un coup. La sensation est tellement puissante que je verbalise le besoin de retourner dans l'eau tout de suite pour pouvoir mieux accueillir les vagues suivantes. La prochaine arrive, je la sens monter en moi, je l'accueille et je sais que je suis en train de vivre les derniers instants avant de serrer mon bébé contre moi. Dès la fin de cette contraction, j'ai le sentiment de me séparer de mon corps, de flotter au-dessus de lui et de littéralement m'endormir. Cette sensation me semble durer une demie heure, peut-être même une heure. C'est ce que l'on appelle la "phase de quiétude", j'ai atteint le sommet du vortex incroyable de la naissance, je suis à dilatation complète. Ma détente et ma confiance à ce moment précis sont sidérantes tant elles me font du bien. Je reprends des forces pour la délivrance. Bien sûr cette phase, dans la réalité, n'aura surement durée que quelques minutes. La suivante arrive à nouveau, je la sens parfaitement arriver et prendre de la puissance, et une fois achevée je passe à 4 pattes, sans même y penser, c'est instinctif.

Une nouvelle contraction dans cette position et K. me souffle qu'il est peut-être temps de pousser. Je me lance mais je suis incertaine et alors que je sens que la tête de mon bébé se présente, je la sens repartir aussitôt... J'ai voulu aller trop vite en besogne. Je m'effondre, je pleure, je crie : "au secours, je n'en peux plus, aidez-moi, sortez-moi ce bébé de là, je n'y arriverais pas..." La voilà, la fameuse phase de désespérance ! Oh je la connais celle-ci et je ne me ferais pas avoir, je sais qu'elle est simplement là pour signifier la fin, l'arrivée imminente du bébé ! Je tiens bon, encouragée par les voix de K. et de mon mari et voilà déjà qu'une nouvelle contraction se présente! Cette fois, c'est la bonne, alors que j'amorce une poussée animale, rugissant comme une lionne, je sens mon bébé qui presse de son côté sur mon col pour m'aider, nous sommes ensemble, nous travaillons de corps. Je sens que ça brûle tout d'un coup sur mon périnée : c'est le cercle de feu, je le sais, quelques secondes défilent, lentement, trop lentement et tout d'un coup plus rien, comme le retour du soleil après la tempête. La tête est passée, je l'ai senti et tout n'est plus que soulagement désormais, gratitude et douceur, je sens ses petites épaules, ses fesses, ses pieds et puis le vide, retenu par le cordon qui frotte à l'intérieur et en même temps à l'extérieur de moi, puis contre mon ventre à mesure que mon mari me tend cette merveilleuse petite fille qu'il a réceptionné lui-même. Il est 15h57.



Les premiers instants après avoir accouché chez moi



Les mots ne rendront certainement pas justice à ce sentiment, à ces sentiments qui viennent faire virevolter mon cœur lorsque je l'attrape enfin , MA FILLE.

L'amour s'empare de moi, l'ocytocine nous enveloppe de toute sa chaleur et plus rien n'existe. Notre petite Rose mettra quelques secondes avant de déployer ses poumons et de respirer pour la première fois. De brèves secondes pendant lesquelles nous sommes tous suspendus à son souffle, inquiets, impatients, craintifs, excités... et enfin la libération, elle respire ! Elle rosit tout de suite, se tonifie dans mes bras et je l'agrippe tout contre mon sein, peau contre peau, ma chaleur mêlée à la sienne. Je savoure ces instants qui semblent durer une vie tant ils sont intenses. Puis avec une grande douceur, K. nous invite mon mari et moi, avec Rose dans mes bras, à sortir de l'eau et à m'asseoir sur le tabouret d'accouchement. Nous plaçons une bassine en dessous et maintenant nous attendons avec bonheur le jumeau de notre petite Rose : son placenta ! L'organe précieux qui a pris soin d'elle durant 9 mois. J'ai hâte de le voir et nous avons prévu de l'honorer comme il se doit. J'ai hâte, parce que lors de mon premier accouchement, je n'ai jamais pu le voir, ni même l'apercevoir... Il a été jeté, sans ménagement, après m'avoir été arraché après une belle expression abdominale. Je manquais tellement d'informations à cette époque que je n'y ai même pas prêté attention mais cette fois-ci TOUT est différent, tout est conscientisé et je veux rendre hommage au placenta de Rose.

Nous savourons les premiers instants tous les trois, mon mari, Rose et moi, dans les bras les uns des autres. K. veille auprès de nous dans toute sa discrétion, m'invite à prendre quelques "fausses inspirations" pour que le placenta se "détache", puis au bout d'une bonne quinzaine de minutes, j'ai une très légère envie de pousser, que j'assouvie et mon placenta sort sans peine, trouvant tout de suite sa place dans la bassine à mes pieds.

J'ai pensé : "Wouaahou c'est énorme !!!!!", il est très beau, exactement comme je l'avais imaginé. K. vérifie qu'il soit entier, qu'il ne reste pas un bout dans mon utérus qui pourrait causer une hémorragie. IMPECCABLE tout est ok.

Nous souhaitions également attendre que le cordon ombilical de Rose soit entièrement vidé du sang et des cellules souches qu'il contient pour le couper. K. me le montre, il est tout blanc et tout mou alors que je me souviens que lorsque mon mari a coupé celui de Margot il était très rigide et dur à couper et encore tout bleu du sang qu'il contenait. Cette fois-ci à nouveau, c'est à mon mari que revient le rôle de couper le cordon de sa seconde fille.

J'entreprends ensuite de me remettre sur mes jambes pour passer en position semi-allongée sur le canapé afin de proposer le sein à mon bébé. J'appréhende tellement ! Dans mes souvenirs de mon premier accouchement, j'avais souffert lorsque j'avais enfin pu me mettre debout, mon épisiotomie, mes jambes, mon bas ventre… tout était lourd et endoloris. Alors j'y vais en douceur, à tâtons, mais à ma grande surprise, je réussi sans mal à me remettre debout et je ne souffre pas ! Mon ventre vide est lourd bien sûr mais aucune douleur ! Je suis si heureuse qu'à cet instant précis je pourrais danser ! Je le dis à voix haute dans la pièce et on en rigole mais moi je suis tellement soulagée. Encore une raison de plus de me remercier, de nous remercier d'avoir vécu cette naissance respectée, sans aucune intervention médicale, au sein de notre foyer. Je m'installe donc sur le canapé, K. procède aux premières vérifications de l'état de Rose ainsi que de l'état de mon périnée qui ne souffre que d'une très légère éraillure qui ne nécessite aucune intervention. Puis il me rend mon bébé aussitôt et je la remet à mon sein tout contre moi. J'avais oublié cette sensation de fusion, elle est encore reliée à moi, même sans son cordon.


Quelques minutes plus tard, autour de 16h45, ça frappe à la porte… la photographe est encore avec nous, tout comme K. et nous nous regardons… mais enfin qui peut bien venir nous déranger ! Ma maman… ma petite maman toute chamboulée, qui n'a pas vraiment compris le fil des événements de la journée et qui après avoir été cherché Margot à l'école s'est dit qu'elle allait la ramener chez nous. Finalement, heureuse maladresse, car Margot va pouvoir rencontrer sa petite sœur, tout juste sortie du ventre de sa maman.

Quel moment magique, elle me demande tout de suite si elle peut la prendre dans ses bras. Mon cœur de maman fond littéralement et je la lui confie immédiatement. Quelle fierté de tenir sa petite sœur tant attendu enfin contre elle. Elle lui fait un bisou et la serre tendrement contre elle.


Nous l'avons fait. Nous avons réussi. Notre bébé est né dans l'intimité, la chaleur, la douceur, la lenteur et le respect. J'ai accouché chez moi et je ne pourrais pas être plus fière de moi, de nous et plus heureuse. Si c'était à refaire, je le referai 100 fois !





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